En renommant sa salle d’études du nom de Yona Friedman, la Maison de l’Île-de-France rend hommage à cet architecte visionnaire, promoteur de la notion de ville durable et de l’architecture mobile. Une singularité et un avant-gardisme à l’image de la maison, à qui le cneai = a prêté une série de dessins et offert des affiches d’une seconde série de collages de l’architecte.
Installé à la Cité internationale de 2020 à 2024, le cneai = est un lieu de recherche, de production, de résidence et de diffusion de l’art contemporain. Il est aussi le légataire du fonds Yona Friedman regroupant plusieurs réalisations de l’architecte : bandes dessinées, maquettes, collages, dessins, documents d’archives ainsi qu’une œuvre à activer le « Musée sans bâtiment ».
Figure majeure de l’architecture mobile, Yona Friedman n’a cessé de réinventer, à partir des années 50, l’architecture des villes par une radicalité visionnaire. Il pensait que l’architecture devait minimiser l’usage des ressources et promouvoir une approche durable. Approche que l’on retrouve à la Maison de l’Île-de-France, premier bâtiment d’habitation collective à énergie positive de source 100% solaire et de récupération d’une telle dimension réalisée en France. La maison a été conçue pour réduire fortement ses consommations énergétiques et ses émissions de gaz à effet de serre, en visant l’exemplarité environnementale grâce à des dispositifs techniques innovants.
Au regard de cette sensibilité commune, le cneai =, qui avait déjà collaboré l’an passé avec la maison pour la tenue de trois ciné-concerts en l’honneur de l’architecte, a choisi d’y diffuser le travail de Yona Friedman. La salle d’études, qui porte désormais le nom de l’architecte, a été inaugurée en présence de Francesco Torrisi, directeur de la maison et Ann Stouvenel, directrice du cneai =.
Architecte franco-hongrois et théoricien de l’urbanisme, Yona Friedman s’est fait connaître dans le monde entier pour ses « utopies réalisables », concepts où l’habitant joue un rôle majeur dans l’élaboration de l’habitat. Avant d’être un style, un trait de crayon ou un contenu de pensée, l’œuvre de Yona Friedman est à considérer comme une méthode. Ce dont il s’agit est de ne plus fabriquer des objets ni de construire des bâtiments, mais d’exprimer des fonctions, d’imaginer des configurations sociales réalisables, et par là-même de réaffirmer le primat de l’usage sur l’objet.
L’individu redevient un acteur responsable de l’amélioration de son environnement.
Parmi ses « utopies réalisables », la « ville spatiale » apparaît comme un projet manifeste. Composée de structures surélevées au-dessus des villes et des fleuves, reliées entre elles par un maillage variable qui laisse apparaître le ciel, la ville offre d’infinies variations aux utilisateurs au gré des évolutions des besoins.
Précurseur et particulièrement focalisé sur les problématiques sociales, Yona Friedman envisage l’architecte comme un consultant, chargé d’élaborer la construction des bâtiments en s’adaptant entièrement aux besoins de l’occupant. Une ville qu’il imagine démocratique pour l’harmonie des relations sociales et qu’il explique dans son livre Comment vivre avec les autres sans être chef et sans être esclave ? (1974). Il prône une flexibilité que les résidents pourront prochainement expérimenter grâce à l’œuvre à activer de l’architecte.
L’architecte a proposé tout au long de sa vie des dispositifs permettant aux habitants urbains de participer eux-mêmes à la construction et à l’organisation de leurs logements. Il a imaginé le projet « Musée sans bâtiment », qui rejoindra la Cité internationale, à l’occasion de son centenaire en 2025. La Maison de l’Île-de-France, la Fondation Avicenne et la Résidence Julie-Victoire Daubié, les trois maisons porteuses du projet, accueilleront sur leurs parvis, un musée sans porte, sans mur, sans toit. Le « Musée sans bâtiment » consiste en une vingtaine de modules, conçus à l’aide de cerceaux en acier de grande taille disposés librement pour que chacun puisse s’approprier librement les lieux. Les étudiants et chercheurs qui vivent à la Cité internationale seront tout particulièrement invités à créer des moments de réflexion et d’échanges sur la spécificité de la Cité internationale : s’impliquer et se confronter aux engagements climatiques que prend le campus aujourd’hui et ceux qu’il envisage demain. Le rôle de chacun devient alors primordial dans le développement du lieu et de son espace.